Séminaire interdisciplinaire francophone du CEFRES. La carte et la frontière
Renouant avec les traditions du CEFRES, le séminaire interdisciplinaire se propose de réunir un vendredi par mois les chercheuses et chercheurs, les doctorant(e)s et étudiant(e)s, les alumni et ami(e)s francophones du Centre afin de débattre des objets à la croisée des disciplines propres à chacun et chacune. En 2023-2024, nous souhaiterions commencer par interroger l’acte même de délimiter et de représenter (un territoire, une période, une trajectoire), bref, à l’aide du feu croisée de nos disciplines respectives, interroger la carte et la frontière.
Lieu : Bibliothèque du CEFRES, Na Florenci 3, Prague 1
Dates : un vendredi par mois, de 10h à 12h
Langue : français
Entre représentation et identité, symbole et projection, entre le concret et l’abstrait, la carte, accompagne l’espèce humaine depuis l’antiquité comme objet, support d’image et des délimitations naturelles ou abstraites imposées aux espaces géographiques, historiques et/ou sociaux. Elle sert également de mémoire, iconographique et imagée, des territoires et des pratiques qui leurs sont associées. Instruments de gouvernement, du moins depuis les temps modernes (Anderson, 2006), au rôle encore accru à l’ère des big data (Mericskay, 2021), les cartes sont utilisées pour leur force de représentation et leur fonctionnalité à des fins de gouvernance, de même que pour leur pertinence géopolitique, historique, philosophique, sociologique ou anthropologique vis-à-vis des territoires qu’elles divisent et juxtaposent. Aussi est-il indispensable d’interroger leur fonction informative, symbolique, représentative ou politique.
Chemin faisant, se pose également la question de la frontière qui connait un développement sans précédent dans la réflexion des sciences humaines et sociales de ces dernières années. Institution, processus et symbole à la fois (Kolossov & Scott, 2013), la frontière dépasse son acception de barrière ou de délimitation close pour adopter une définition beaucoup plus dynamique. Que ce soit au vu des conflits ou des échanges transfrontaliers, la ligne de démarcation que suppose la frontière se doit aussi et surtout d’être comprise comme une zone poreuse qui réunit des espaces formellement disjoints, plus étendue que ce que suppose son tracé cartographique, de manière à saisir sa fonction de mise en contact et de passage. Il n’en reste pas moins que contribuant à générer de nouvelles pratiques sociales, affirmant de toutes pièces ou réaffirmant des différences entre deux espaces géographiques et/ou sociaux donnés, la frontière, fétichisée, permet d’ériger des identités nationales ou régionales si elle est conçue comme rempart ou ligne de disjonction protectrice.
Carte et frontière, projection et déformation, trajectoires de l’imaginaire et délimitations du politique seront donc au cœur de notre réflexion interdisciplinaire à la charnière entre disciplines propres aux intervenant(e)s et participant(e)s de ce séminaire visant à observer des territoires communs par-delà les frontières habituellement admises. Nous nous proposons de partir à chaque séance d’un objet, concret et palpable, proposé par l’intervenant(e) : une carte donc, accompagnée éventuellement d’un bref extrait de texte pour ouvrir un débat conceptuel entre collègues et entre disciplines. Une réflexion métadiscursive sur la manière dont se constituent nos objets respectifs à l’ère du tournant spatial sera également la bienvenue.
Références citées :
- Anderson, Benedict, L’imaginaire national. Réflexions sur l’origine et l’essor du nationalisme, trad. fr. de Pierre-Emmanuel Dauzat, Paris, La Découverte, 2006.
- Mericskay, Boris, « Les effets de l’open data et du Big Data dans la fabrique des cartes de l’action publique : entre repositionnement des acteurs et démonopolisation de l’expertise autour des données territoriales », Les cartes de l’action publique : Pouvoirs, territoires, résistances, p.107-130, 2021. ⟨halshs-03464763⟩.
- Kolossov, Vladimir – Scott, James, « Selected Conceptual Issues in Border Studies », Belgeo: Revue belge de géographie, 2013, 1, p. 2-16.
Calendrier du semestre d’hiver 2024-2025
4 octobre 2024
Jakub ŠTOFANÍK (Institut Masaryk et archives de l’Académie tchèque des sciences)
Le château de Prague, cartographie de la construction de l’espace républicain en Tchécoslovaquie dans l’entre-deux-guerres
1er novembre 2024
Pascal SCHNEIDER (docteur en histoire contemporaine de l’Université Paris-Sorbonne)
Deux territoires européens face à l’histoire
13 décembre 2024
Alžbeta KUCHTOVÁ (Institut de philosophie, Académie slovaque des sciences)
Les frontières de la montagne ou du rocher
Retrouver le programme du séminaire 2023-2024 ici.