AAC – Mouvements urbains et politiques locales dans les PECO : développements récents et ambivalences conceptuelles

Journée d’étude internationale organisé par le CEFRES en coopération avec l’Institut des études sociologiques (Faculté des sciences sociales, Université Charles de Prague), Fundacja Zatoka (PL) et Periféria (HU)

Date : 4-6.11.2021
Lieu : CEFRES, Prague et en ligne
Langue
: anglais
Date limite d’envoi des propositions : 30.5.2021
Préprogramme :
jeudi soir : discours d’ouverture et réception
vendredi : présentations
samedi matin : visite urbaine critique dans le quartier de Karlín, « d’un quartier ouvrier à un symbole de gentrification »

La journée d’étude explore le rôle des institutions politiques et des mouvements sociaux dans le processus de changement urbain dans les pays d’Europe centrale et orientale (PECO). Le cas de Prague montre que les villes post-communistes ont une historicité particulière en termes de développement urbain après 1989. D’une part, l’idéologie du libre marché a été introduite de façon soudaine. D’autre part, les institutions n’étaient pas préparées et se sont révélées incapables d’inclure les citoyens dans les débats sur l’espace urbain – l’État et les instances municipales sont technocratiques et élitistes ou bien excluent les organisations civiques (Horák 2007 ; Sýkora et Bouzarovski 2012). La délégitimation mutuelle des fonctionnaires municipaux et des activistes, le manque de confiance dans la politique municipale, l’utilisation abusive de la politique municipale comme canal de soutien des intérêts des promoteurs immobiliers influencèrent le développement urbain dans les années 1990.

L’évolution historique, institutionnelle et politique spécifique des PECO a donné lieu à une critique de l’application aveugle de l’appareil conceptuel des sciences sociales occidentales sans autre réévaluation critique. Les récits du « rattrapage de l’Occident » sont réévalués au prisme d’approches plus complexes incluant l’Ouest et l’Est en tant que composantes du même système mondial (Gagyi 2015). La culture politique locale représente également un sujet d’intérêt (Císař 2008). En termes de développement urbain, des facteurs tels que le déficit démocratique au niveau municipal, conduisant à l’absence de mécanismes d’engagement public, ou l’image de l’urbanisme comme hostile à l’idéologie du libre  marché, sont quelques facteurs spécifiques aux pays post-communistes (Jacobsson 2015 ; Pixová 2018, 2020 ; Sýkora a Bouzarovski 2012 ; Temelová 2009). Comment appliquer et repenser les concepts d’étude des mouvements sociaux, y compris des mouvements sociaux radicaux, dans ce contexte ?

Enfin, l’urbanité n’est pas seulement une question de gouvernance et de résistance, mais aussi de carte urbaine physique. Une variété d’espaces ouverts, de squats, de centres sociaux et de centres de jeunesse constitue une infrastructure pour les mouvements sociaux. En considérant la notion de dialectique socio-spatiale définie par Edward Soja (l’espace et les relations sociales s’influencent mutuellement) (Soja 1989), on pourrait suivre les relations entre la gouvernance de l’espace urbain, l’accessibilité de l’espace urbain aux initiatives locales et aux projets activistes, et le développement des mouvements sociaux.

Les chercheurs travaillant sur les politiques urbaines, les mouvements urbains radicaux et modérés, les initiatives civiques urbaines et les groupes auto-organisés, les mouvements de locataires, les espaces autonomes et décommodifiés sont invités à participer à cet appel. Les réflexions sociales et historiques critiques sur le développement urbain dans les PECO, ainsi que les chercheurs et les activistes-chercheurs personnellement impliqués, sont les bienvenus. L’objectif de l’atelier est de partager les connaissances et les pratiques selon trois axes non exclusifs :

  • historicité des mécanismes institutionnels dans les PECO et gouvernance de l’espace urbain dans les grandes villes : tendances persistantes et nouveaux acteurs ?

Le développement urbain local dans les années 1990 et 2000 a été marqué par plusieurs phénomènes inégaux. Pour n’en citer que quelques-uns : faible participation du public, délégitimation mutuelle des activistes, des fonctionnaires de l’État et des politiciens locaux, présence des grands partis politiques plutôt que des initiatives de base dans la politique municipale – le cas de Prague (Horák 2007). Ces tendances ont alimenté les transformations au niveau municipal, par exemple, les activistes entrant en politique dans le but d’ouvrir les structures d’opportunités politiques aux acteurs de base (Pixová 2020), les nouveaux mouvements politiques progressistes basés localement et les partis émergeant dans les grandes villes. Comment d’autres phénomènes institutionnels, politiques et sociaux remontant aux années 1990 influencent-ils la politique dans les villes aujourd’hui ? Quel rôle jouent les grandes villes dans la politique progressiste des PECO ? Peut-on observer des tendances qui pourraient être considérées comme de « nouveaux municipalistes » (Purcell 2006 ; Russell 2019) ? Quel est le rôle de la périphérie dans les processus de transformation urbaine ?

  • les applications des concepts utilisés pour l’étude de l’activisme urbain dans les pays occidentaux et leur réévaluation critique dans les PECO/EEE.

Les « suspects conceptuels habituels » des études sur les mouvements sociaux (structure d’opportunité politique, mobilisation de recours, etc.) sont-ils adaptés au contexte des PECO ? Que pouvons-nous dire de concepts tels que la préfiguration et l’action directe appliqués à la recherche sur les mouvements radicaux ? Bien que les deux ensembles de concepts soient appliqués dans le contexte centre-européen, une réévaluation critique de leur compatibilité avec le contexte local fait toujours défaut.

  • dialectique socio-spatiale : pas d’espace, pas de mouvement ?

Alors qu’en Pologne le mouvement des squatters et des locataires est assez important, la situation est différente dans les autres PECO. La République tchèque est un pays où il n’existe qu’un seul centre social politique, mais où l’on trouve une pluralité d’initiatives urbaines auto-organisées. En quoi ce fait est-il lié à l’espace physique (aux infrastructures) que le mouvement parvient à acquérir et à entretenir ? Comment les différents types d’espaces urbains influencent-ils la force des mouvements et quels types d’espaces pouvons-nous observer dans les PECO ? Contre quoi ces mouvements luttent-ils ? Alors que le développement urbain capitaliste repousse les habitants à la périphérie par une financiarisation gravée dans le marbre, quelles stratégies spatiales de résistance subsistent ?

Envoyez, d’ici au 30 mai 2021 vos propositions d’interventions (résumé de 300 mots maximum) pour des exposés de 20 minutes et une courte biographie (150 mots) à Yuliya Moskvina (yuliya.moskvina@fsv.cuni.cz).
Une aide aux frais de voyage et d’hébergement peut être proposée aux participants qui ne sont pas en mesure d’obtenir un financement de leur institution. 

Comité scientifique

  • Jérôme Heurtaux (Centre français de recherche en sciences sociales, Prague)
  • Yuliya Moskvina (Faculté des sciences sociales, Université Charles, Prague)
  • Lukáš Kotyk (Faculté des sciences sociales, Université Charles, Prague)
  • Zsuzsanna Pósfai (Centre de politique et de recherche Periféria, Budapest)
  • Grzegorz Piotrowski (Institut de sociologie, Université de Gdańsk)
  • Yoann Morvan (CNRS, Paris)