Ruptures et reconfigurations dans les SHS depuis l’invasion de l’Ukraine

Paysage disloqué.
Ruptures et reconfigurations dans les sciences humaines et sociales depuis l’invasion russe de l’Ukraine

Cette journée d’étude dans le cadre du programme de bourses non-résidentielles pour les chercheurs ukrainiens mis en place par le Centre français de recherche en sciences sociales (CEFRES) en étroite collaboration avec le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, l’Ambassade de France et l’Institut français en Ukraine, ainsi que, à l’Université Charles, le Centre de recherche pour l’Ukraine dans une Europe qui change de la Faculté des sciences sociales, le Département d’étude de l’Europe orientale de la Faculté de Lettres,  ainsi que, pour l’Académie tchèque des sciences, l’Institut d’histoire de l’art et l’Institut d’histoire contemporaine.

Date : 22 & 23 octobre 2024
Lieu : au CEFRES et en ligne (pour obtenir le lien, merci de contacter l’adresse : cefres@cefres.cz)
Langue : anglais

Organisateurs
Mateusz Chmurski (CEFRES, Prague)
Pavlo Khudish (Université nationale d’Uzhhorod)
Valeriya Korablyova (Faculté des sciences sociales, Université Charles, Prague)

Comité scientifique
 Eva Voldřichová-Beránková (vice rectrice pour les relations internationales, Université Charles, Prague)
Luba Jurgenson (Sorbonne Université, Paris)
Kateřina Králová (Faculté des sciences sociales, Université Charles, Prague)
Sophie Lambroschini (ANR/BFG LimSpaces, Centre Marc Bloch, Berlin)
Gilles Lepesant (CNRS – CEFRES)
Viktoria Sereda (Institut ukrainien virtuel d’études avancées, Berlin)

Partenaires
CEFRES
Centre de recherche sur les cultures et les sociétés d’Europe centrale et orientale et des Balkans (UMR 8224 Eur’ORBEM, CNRS-Sorbonne Université), Paris 
Centre de recherche l’Ukraine dans une Europe qui change, Faculté des sciences sociales, Université Charles (IMS FSV UK), Prague

 

 Thématique

Brisant définitivement l’ordre établi après la guerre froide, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a entrainé plusieurs reconfigurations dans les sociétés, les économies et les cultures contemporaines. De par son retentissement géopolitique, le conflit a non seulement empêché mais aussi initié et renforcé des initiatives de recherche en sciences sociales. Alors que de nombreux changements conceptuels, thématiques et institutionnels devront être saisis et analysés dans les années à venir, il est nécessaire, dès aujourd’hui, de questionner ce paysage (académique) fracturé.

Les universitaires et chercheurs ukrainien font face à la guerre et à ses conséquences au quotidien, néanmoins, ils développent aussi des liens avec une diaspora académique grandissante. Les questions de sécurité, les difficultés à la mobilité ainsi que les barrières administratives ne sont qu’une partie des difficultés auxquelles ils sont confrontés. Cependant, des chercheurs se rendent en Ukraine, de nombreux programmes à distance bénéficient des nouvelles technologies et « la guerre la plus documentée » ouvre des séries de questions épistémologiques, éthiques, légales ou simplement technologiques (sujet abordé par exemple récemment au symposium ayant pris place au Centre d’histoire urbaine de Lviv du 4 au 6 juin 2024). Ces initiatives témoignent de l’effort accru destiné à documenter et mener des recherches malgré la violence mais aussi pour inventer de nouveaux outils de recherche, proposer de nouveaux modèles d’analyse ou évaluer l’influence des processus et des reconfigurations à l’œuvre.

En parallèle, les chercheurs occidentaux travaillent par « prospection et rétrospection » (Johnson 2023) afin de réagir au plus vite aux évènements en cours par demande populaire et politique. La recomposition de nombreuses institutions, prises de position et programmes de recherche témoigne d’un moment où l’expertise (et souvent les experts eux même) se trouvent pris au dépourvu. Il en résulte que des chercheurs ukrainiens sont passés d’une défiance épistémique à une exploitation épistémique (Khromeychuk 2022: 194). Des mesures symboliques sont néanmoins (enfin) prises. Pour n’en citer qu’une, depuis la visite de la première dame d’Ukraine à Paris, après des années d’absence, une chaire d’études ukrainiennes est amenée à être créée à Sorbonne Université, dans le département des études sur l’Europe centrale  ce qui en fera la deuxième chaire de ce type en France.

 Le moment est-il venu où, au lieu de parler de la recherche ukrainienne, la communauté scientifique va se mettre à parler avec elle ? Il est encore tôt pour se prononcer dans un contexte où le « palimpseste des narrations » ne cesse de se densifier (Korablyova 2022). Il semble dès lors d’autant plus important de s’efforcer de prendre régulièrement du recul et d’initier une réflexion commune et interdisciplinaire sur les évolutions récentes de la recherche, quand bien même toute approche synthétique semble particulièrement difficile.

 Dans la continuité de la journée d’étude de septembre 2023 organisée par le CEFRES avec les chercheurs lauréats du programme de bourses non résidentielles en sciences humaines et sociales, l’édition 2024 vise à « cartographier les paysages » : faire le point sur les méthodes, les modèles et les objets d’études mobilisés par les 21 chercheurs  non-résidents du CEFRES, venus de neuf villes universitaires ukrainiennes. Ils échangeront avec des chercheurs invités mais aussi des interlocuteurs issus des institutions partenaires du CEFRES, l’Académie tchèque des sciences tchèque, l’Université Charles (Prague), mais aussi  des institutions universitaires et de recherche françaises et d’Europe centrale. Lors du travail préliminaire, trois domaines d’études des chercheurs ukrainiens contemporains ont émergé et seront dès lors considérés :

 Art, littérature et politique : processus, pratiques et héritages​ 

  • Art, identités et culture visuelle : de l’iconoclasme aux musées ; les stratégies de propagande
  • Culture, langage et identités nationales : idéologies & comportements
  • Littérature et société, littérature dans la société : histoire, guerre, traumatismes du présent et du passé
  • L’État et la protection de l’héritage culturel, qu’il soit matériel ou immatériel, mobilier ou immobilier
  • Les sciences humaines ukrainiennes au 20ème siècle

Enjeux postcoloniaux, décoloniaux et mémoriaux et leurs implications. du local au global

  • Dichotomies entre le local et le global, le subjectif et l’universel, le commun et l’individuel dans le paysage bouleversé des sciences sociales contemporaines
  • Cultures post coloniales, post impériales & leurs implications : le cas de l’Ukraine dans une perspective régionale, locale, européennes ou globale
  • Représentations de la guerre : reflets de la guerre et processus de formation de la mémoire collective
  • Trajectoires héroïques, discours et processus de mémorialisation de la guerre
  • Mondialisation : changements, modèles et prévision dans les processus économiques et sociétaux

L’Ukraine, l’UE et la guerre : état des lieux, transformation et avenir

  • Transformation numérique de l’économie : effets (intelligence artificielle, blockchain, IoT…), business modèles, marchés du travail, et démocratie (comprend aussi l’économie verte et les avancées dans les émissions bas carbone)
  • Économie des données et de l’analyse : big data, machine learning, algorithmes pour la prévisions de tendances, d’indices économiques et processus d’affaires
  • Inégalités économiques et sociales : causes, conséquences, politiques
  • Migrations et intégration économique : impact et conséquences
  • Prévisions pour l’économie ukrainienne d’après guerre