Pompiers, orchestres de Tsiganes, cavaliers-paysans, cantines : les sociétés locales post-impériales en Europe du Centre-Est dans le monde des États-nations, 1918-1930

Une conférence de Gábor Egry (Institut d’histoire – Académie hongroise des sciences)

Discutant : Rudolf Kučera (Institut Masaryk – AV ČR)

: Na Florenci 3, bâtiment C, 3e étage, salle de conférence

La fin de la Première Guerre mondiale a conduit à des développements similaires dans toute l’Europe du Centre-Est : l’écroulement des empires et l’émergence d’États-nations. Mais derrière la façade de transformations apparemment uniformes et la tendance à la nationalisation dans les nouveaux États, les sociétés locales et les micro-régions étaient parfois moins limitées dans leur influence sur les conditions spécifiques de transition que ce qu’on considère habituellement dans le cadre du récit dominant sur la chute des empires et la création des États-nations. Le passé impérial n’a pas disparu sans laisser de trace ; de plus, les nouvelles entités agissaient souvent comme de « mini-empires » reprenant ou conservant des acteurs, des méthodes et des structures de la gestion impériale du pouvoir et de la population.

A gypsy band from Sannicolau Mare. Source: romaniainterbelica.memoria.ro
Orchestre tsigane de Sannicolau Mare. Source:
romaniainterbelica.memoria.ro

Comparer des études de cas de la transition au niveau local permet un aperçu des contextes locaux, de la manière dont différentes constellations sociales locales, des préhistoires impériales, ont aidé certains groupes à négocier leur position dans les nouveaux États. Si certaines pratiques, habitudes ou institutions furent maintenues et souvent employées pour coopter les nouvelles élites dans le cercle des anciennes, certaines figures particulières de l’époque impériale parvinrent à se déplacer de manière fluide entre les États successeurs, et des changements sociaux de large portée affectèrent l’équilibre général et conférèrent de l’agency à des groupes jusqu’alors désavantagés. Dans ma conférence, je désignerai les plus importants facteurs régissant les différents types de transition et montrerai comment les individus se sont situés dans le nouveau monde des États-nations.

Prague et ses mythes

Prague et ses mythes

Lieu : CEFRES, Na Florenci 3, Prague 1
Date
: 5 avril 2024, 10h00 CET
Langue : anglais et français

Organisateurs

  • CEFRES (Centre français de recherche en sciences sociales)
  • Institut des études sociologiques, Faculté des Sciences sociales, Université Charles
  • Institut de littérature tchèque de l’Académie tchèque des sciences

Comité scientifique et comité d’organisation

  • Mateusz Chmurski
  • Michèle Baussant
  • Alessandro Testa

Intervenants

  • Jean Boutan, Eur’ORBEM, CNRS-Sorbonne Université
  • Tomáš Bubík, Palacky University Olomouc
  • Stanislav Holubec, Czech Academy of Sciences
  • Michèle Baussant, ISP CNRS-Paris Nanterre-ENS/CEFRES
  • Richard Müller, Czech Academy of Sciences
  • Marco Pasi, University of Amsterdam
  • Jiří Pelán, FF Charles University
  • Alessandro Testa, FSV Charles University

Programme

10.00: Introduction

10.15-11.15:  Prague magique

Marco PASI (University of Amsterdam, Faculty of Humanities), Prague: The City of Magic and Occultism
Alessandro TESTA (Charles University, ISS FSV UK/CEFRES), Praga Magica: The Late Modern Evolutions of a Cultural Myth

11.15-11.30: break 

11.45-12.45: Religious Prague

Tomáš BUBíK (Palacký University Olomouc, KSAKA FF UPol), Religious’ Prague : Scenes from selected Public Spaces (a Cemetery, a Square, a Museum)
Michèle BAUSSANT (Institut des sciences sociales du politique, ISP CNRS-Paris Nanterre-ENS/CEFRES), Une Prague des absent.es ? Entre renaissance de l’héritage juif et recréation d’une vie cultu(r)elle

12.45-13.00: Discussion

13.00- 14.30: Lunch break

14.30-16.00: Modern Prague

Jean BOUTAN (Cultures d’Europe orientale, balkanique et médiane, Eur’ORBEM, CNRS-Sorbonne Université), Libuše reine de Cacanie: la postérité d’un mythe d’un autre temps après 1918
Richard MÜLLER (Czech Academy of Sciences, ÚČL AVČR), Kafka, Simmel, and Writing of the Metropole Sciences
Stanislav HOLUBEC (Czech Academy of Sciences, HIÚ AVČR), The Myth of Working Class Prague: Between Communist Sacralization and Postcommunist Forgetting

16.00-16.15: Final discussion 

Résumé

Cette journée d’étude explorera les différentes déclinaisons de l’idée de Prague à l’époque moderne et contemporaine, en mettant l’accent sur la littérature, les pratiques sociales, les phénomènes religieux et les processus de patrimonialisation. Ces motifs ou tropes sont ici définis comme des « mythes », empruntant à la fois aux formes de la culture élitiste et populaire. Ils renvoient à des imagines spécifiques et à des traces des passés contrastés et complexes de Prague, et de son histoire. Le patrimoine religieux et ésotérique de la ville, en particulier, en sus de son bagage multiculturel et « hinternational », pour reprendre le terme d’Urzidil, trouvent désormais une valeur nouvelle en tant que symboles d’une identité et d’une histoire tchèques partagées, certains lieux étant honorés en tant que « lieux de mémoire », d’autres, ignorés ou tus (« lieux de l’oubli »), leurs significations historiques en partie reformulées.

Certains de ces mythes fournissent également un tremplin important pour le tourisme de masse, ce qui, paradoxalement, ravive les sites juifs, mais également d’autres lieux religieux ou mythiques comme espaces romantiques ou « disneyifiés », consommés et déconnectés en partie des milieux vivants de la mémoire.

Cette journée d’étude vise à repenser ces passés mythifiés et leur renaissance à Prague, en mettant particulièrement l’accent sur :

  • Le mythe de « Praga magica », la ville mystique
  • Le mythe de Prague, le « Traumreich » (Kafka, Meyrink, Ajvaz, Kubin, Crawford, etc.)
  • Le mythe de Prague, la ville juive
  • Le mythe de Prague, la ville de confrontation entre le catholicisme et ses dissidents
  • Le mythe de Prague, la ville multiculturelle et cosmopolite
  • Le mythe de Prague en tant que trope littéraire
  • Le mythe de Prague, la ville post-communiste du tourisme de masse

Quelles tendances culturelles ont conduit à la valorisation d’un passé mystique et ésotérique dans un pays qui revendique être le plus athée en Europe ? Ou encore d’un passé juif, dans un lieu où il n’y a que peu de Juifs ? Voire d’un cosmopolitisme pourtant en partie éradiqué après la Seconde Guerre mondiale ? En usant du célèbre livre de Ripellino, Praga Magica, publié il y a 50 ans, au pic de la normalizace imposée par les Soviétiques, comme point de départ, nous avons l’intention de réexaminer les dynamiques sociales et culturelles souvent ambivalentes ainsi que les transformations de Prague telles qu’elles se reflètent dans la littérature, l’art, les politiques identitaires, les anciennes et nouvelles formes de religiosité et de spiritualité, et la patrimonialisation. Nous projetons d’explorer ces aspects et dynamiques dans le contexte du passé communiste de la ville et du présent néolibéral.

Pratique pénale et altérité confessionnelle : le bannissement dans le Saint-Empire germanique moderne

Falk Bretschneider (maître de conférence à l’EHESS) animera une session du Séminaire historique franco-tchèque.

Date : Jeudi 15 avril, 9h-12h30
Lieu 
: CEFRES et en ligne (voir ci-dessous)
Organisateur 
: CEFRES et Institut d’histoire de la Faculté des lettres de l’Université Charles
Langue
 : français

Le thème de l’atelier : Vie de bannis

Voyez le programme du Séminaire historique franco-tchèque (FFUK et CEFRES)

Pour accéder à la réunion Zoom, cliquez sur le lien suivant : https://cesnet.zoom.us/j/96694269885

Pour vous inscrire, contactez Jaroslav.svatek@ff.cuni.cz

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Présences sociales : propositions pour une approche temporelle et sexuée des interdépendances

Dans le cadre des Grandes conférences de la Plateforme CEFRES,  le sociologue Marc Bessin, directeur de l’IRIS – Institut de Recherche Interdisciplinaire sur les enjeux Sociaux (UMR8156 CNRS – EHESS – U997 Inserm – UP13), donnera une conférence sur les « Présences sociales ».

Langue : en français, traduction simultanée en tchèque.

Lieu : au CEFRES, Národní 18, Prague 1, salle de conférence, 7e étage.

Résumé
Cette conférence s’appuie sur des travaux empiriques sur les prises en charge sanitaires, sociales ou parentales, qui seront rapidement présentées pour alimenter les débats sur les dimensions morales et pratiques des activités de care, en insistant sur les enjeux de sexuation et de temporalisation. On postulera que ces pratiques d’accompagnement n’épargnent pas l’espace académique, qui sera abordé au prisme des tensions temporelles entre l’accélération qui affecte nos pratiques de recherche et la Slow Science à laquelle se réfère la sociologie des présences sociales.
Cette sociologie des présences sociales s’inscrit dans la tradition féministe qui observe la division sexuée du travail de prise en charge des besoins d’autrui. Mais elle intègre aussi les dimensions morales des diverses formes de soutiens, assistances, aides et interventions sociales, dans la tradition des politiques et éthiques du care. Dans cette combinaison, tout en suivant certaines approches en termes d’économies morales qui rappellent que les politiques publiques ou sociales s’opèrent dans une tension entre protéger et punir, la sociologie des présences sociales précise que cette distorsion s’étend aux attentions profanes et aux prises en charges privées et souligne surtout que cette polarité des interventions pour autrui est genrée. Loin de naturaliser la protection maternelle de la main gauche de l’Etat et l’autorité paternelle de ses fonctions régaliennes, c’est une approche temporelle des interdépendances qui permet de comprendre la division sexuée du travail social, sanitaire et sécuritaire. La tendance néolibérale contemporaine à la pénalisation de l’Etat social et sa re-masculinisation est la résultante des renoncements à la temporalisation de l’intervention publique et à la généralisation de l’esprit gestionnaire et de son présentisme, jusque dans les secteurs sanitaire, éducatif et social.
En considérant ainsi la temporalité au principe du genre, suivant en cela la problématisation des rapports sociaux de sexe, on peut dès lors définir les présences sociales comme des activités morales ou pratiques, profanes ou professionnelles, de veille ou d’intervention, sécuritaires ou protectrices, destinées à répondre aux besoins d’autrui. La notion de présence permet d’appréhender le processus au-delà de sa dimension matérielle, en ne se limitant pas à l’action présente ni à une relation dyadique. L’impact des présences sociales peut être différé ou s’inscrire dans des logiques de circulation, de don et de dette. Le genre féminin étant caractérisé par une disponibilité temporelle et la responsabilité de la durée, les activités de care sont féminisées et ce sont les femmes qui sont assignées pour en assurer la transmission.
On pourra enfin tirer les conséquences de ces propositions quant à l’engagement du chercheur sur son terrain et dans le monde académique. Ainsi, loin d’un rapport fondé sur la distance censée produire une connaissance neutre de la réalité sociale, ce sont des présences qu’assument les chercheur-e-s en sciences sociales sur le terrain. Elles sont faites de compassion, d’empathie, d’attentes, d’accompagnement et de soutien qui les engagent dans une relation de care. Celle-ci n’est pas unilatérale et peut s’engager dans la durée, allant vers une co-production de savoirs, voire de la recherche-action. La sociologie du travail de l’espace social où les chercheurs restituent, divulguent et transmettent les recherches issues de ce terrain est également caractérisé par d’autres présences. Le monde académique est tout aussi inégalitaire et traversé par les différents rapports sociaux de domination. Une lecture en termes de présences sociales peut en termes descriptifs mettre au jour le travail invisible et déconsidéré de nombre de ses acteurs, qui sont le plus souvent des actrices. En termes normatifs, parler de présences académiques, assumer les relations de care dans le monde de l’enseignement et la recherche, et ainsi objectiver les interdépendances de ses protagonistes, permet d’envisager d’autres formes de circulation du savoir, en prenant soin cependant d’y observer la perpétuation des rapports de pouvoir.
Quoi qu’il en soit, cette attention aux présences académiques impose de s’interroger sur l’esprit gestionnaire qui affecte l’univers de l’enseignement supérieur et de la recherche, se traduisant par une stigmatisation importante du temps long de nos activités et de sa dimension collective. Comment résister à ces tendances fortes tout en ne traduisant pas cette posture par un retrait du chercheur dans sa Tour d’Ivoire ? La sociologie des présences sociales entend contribuer à réfléchir à ces enjeux cruciaux pour les sciences sociales.

Présentation de livre : Changes in Cultural Landscape

Changes in Cultural Landscape of Czech-German Borderlands since 1918 until Nowadays on the Example of Dolní Žandov Commune, par Karolina Ćwiek-Rogalska

Horaire et lieu : 15 mars 2018, 16:30, Bibliothèque du CEFRES
O
rganisatrice : Ania Gnot (U. of Opole, Institute of Czech Literature of the Czech Academy of Sciences, associate PhD fellow at CEFRES)
Discutant : Paul Bauer (FSV UK)
Langue : anglais

Ce livre porte sur les changements dans le paysage culturel des régions frontalières tchèques, à partir de l’exemple de la commune de Dolní Žandov (anciennement appelée Unter Sandau). De manière significative, ce paysage a été co-crée par la population germanophone qui, ayant été déplacée,  avait pratiquement disparue après 1945. Ce fut une cause de changement aussi bien dans la culture, que dans la société et le paysage. Cette recherche porte sur les personnes qui se sont installées – ou qui ont été installées – dans la commune de Dolní Žandov, et sur ceux qui y vivaient avant 1945.

À propos de l’auteure
Karolina Ćwiek-Rogalska, PhD. Experte en Cultural studies, slaviste, ethnologue. Ses sujets de recherche portent sur l’anthropologie des paysages, les cultures des régions frontalières et les déplacements forcés en Pologne et en Tchécoslovaquie après 1945, ainsi que sur l' »hantologie » comme outil de recherche anthropologique. Karolina Ćwiek-Rogalska travaille actuellement comme professeure assistante  à l’Institut d’Etudes slaves, au sein de l’Académie des Sciences polonaise de Varsovie. Son premier livre Zapamiętane w krajobrazie. Karjobraz czesko-niemieckiego pogranicza w czasach przemian a été publié en 2017. Elle conduit actuellement un nouveau projet intitulé « Recycling of memory. German War Memorials in Central Pomerania region », financé par le Centre scientifique national de Pologne.

Contactkarolina.rogalska@ispan.waw.pl

Karolina Ćwiek-Rogalska : Zapamiętane w krajobrazie. Krajobraz czesko-niemieckiego pogranicza w czasach przemian, Scholar, 2017.
Pour plus d’informations sur le livre.

La présentation sera suivie d’une collation.

Présentation de livre. Ethnographies pré-textuelles

Pre-textual Ethnographies. Challenging the phenomenological level of anthropological knowledge-making,
par Tomasz Rakowski & Helena Patzer (dir.)

Horaire et lieu : 30 novembre 2018, CEFRES, Na Florenci 3, Prague 1 (salle de conférence, 3e étage)
O
rganisateurs :  Institut d’ethnologie de l’Académie tchèque des sciences et CEFRES
Langue : anglais

Avec la participation des auteurs :
Tomasz Rakowski
 (Institut d’ethnologie et d’anthropologie culturelle, Université de Varsovie)
Helena Patzer (post-doctorante à l’Institut d’ethnologie de l’Académie tchèque des sciences, Prague)

Discutants :
Daniel Sosna (Université de Bohême de l’Ouest, Plzeň)
Ewa Klekot (Université de Varsovie/Poznan School of Form)

Modérateur :
Luděk Brož
 (Institut d’ethnologie de l’Académie tchèque des sciences, Prague)

Résumé

Dans leurs ouvrages, les anthropologues ne rendent pas compte de  leurs expériences de terrain, bien que ces dernières aient un impact décisif sur leurs analyses ainsi que sur leurs travaux à plus longue échéance. Cet ouvrage explore ces strates de la construction du savoir que sont les études de terrain.
Les auteurs relèvent le défi de reconstituer la façon dont ils ont originellement pénétré les mondes qui constituent leurs objets d’analyse (leurs Autres anthropologiques) en scrutant les processus « pré-textuels » profondément phénoménologiques que sont la prise de note, l’écoute et autres perceptions sensorielles. À partir d’un large éventail d’expériences de recherche – avec les Dogons au Mali, les joueurs de footballs immigrés en Espagne, les Inuits du Grand Nord, les familles transnationales des Philippines, les mineurs de Pologne et les étudiants en Ecosse – l’ouvrage va au-delà d’une simple exploration d’une sensibilité ethnographique exacerbée envers les mots et les pratiques. Il a l’ambition de lancer la mise en place d’une nouvelle langue pour rendre compte des travaux anthropologiques. Cette langue puise à l’expérience récurrente de la participation et s’ancre dans le monde pré-textuel du non-dit et souvent du non-visible ainsi que dans les expériences intenses qui sortent des limites des rapports textuels conventionnels.

“These edifying essays lay the groundwork for an
anthropology that not only overcomes old antinomies
of body-mind, text-context, representation-reality, but
encourages us to see how participatory method, social
attentiveness, and new forms of ethnographic writing can
enhance our understanding of the affective, intersubjective,
and conceptual complexities of life as lived,”
Michael Jackson, Distinguished Professor of World Religions, Harvard University